Société
Par Marine Ernoult / IJL – Réseau.Presse – La Voix acadienne
«Il s’agit certainement d’une culture que nous pouvons utiliser pour nous adapter aux dérèglements climatiques», estime le biologiste Dan MacEachern. (Photo : Gracieuseté)

De plus en plus d’agriculteurs choisissent de cultiver du maïs dans la province, que ce soit comme fourrage pour les animaux ou pour la consommation humaine. Le sol et le climat insulaires sont favorables à sa croissance et la plante est encore à l’abri des maladies. 

La culture du maïs n’a jamais été aussi populaire à l’Île-du-Prince-Édouard. Quelque 23 500 acres sont aujourd’hui cultivées dans la province.

«Depuis dix ans, les surfaces semblent augmenter de façon exponentielle chaque année dans toute l’île», confirme la professeure d’agronomie à la Faculté d’agriculture de l’Université de Dalhousie en Nouvelle-Écosse, Yunfei Jiang. 

«De plus en plus d’agriculteurs se lancent dans la culture commerciale du maïs grain pour la consommation humaine, ce ne sont plus seulement les éleveurs laitiers qui en font pousser pour leurs bêtes, poursuit le biologiste d’Agriculture et Agroalimentaire Canada à l’Île-du-Prince-Édouard, Dan MacEachern. La qualité des grains a aussi fortement progressé.» 

Selon le chercheur, le maïs est «très utile» dans la rotation des cultures pour rompre les cycles de maladies : «Le cultiver en alternance avec des pommes de terre ou des fraises fonctionne bien, car ces espèces ne sont pas sensibles aux mêmes ravageurs et maladies.»

Des prix avantageux 

Les prix de vente avantageux du grain expliquent également ce succès. «C’est généralement une culture qui coûte cher, mais qui offre un bon rendement», confirme le directeur général de la Société des silos à grains de l’Île-du-Prince-Édouard, Neil Campbell. 

Ces dernières années, les cours du grain jaune s’étaient envolés. À cause des fortes incertitudes économiques liées à la pandémie de COVID-19 et à la guerre en Ukraine, les matières premières agricoles jouaient un rôle de valeur refuge. En 2022, le maïs se vendait ainsi près de 400 dollars la tonne. 

Aujourd’hui, si les prix ont presque été divisés par deux sur les cours mondiaux, «les agriculteurs arrivent toujours à faire des bénéfices», assure Neil Campbell.

Le sol et le climat insulaires sont également bien adaptés à la culture maïsicole. Grâce aux montants de précipitations annuelles que reçoit la province, les champs «n’ont pas besoin d’être irrigués», relève Dan MacEachern. 

«Ce qu’il faut absolument éviter, c’est le gel et les grands froids à la fin de l’été, pendant les deux premières semaines de septembre notamment, complète Neil Campbell. Ça peut mettre les récoltes par terre.» 

Pour l’instant, la plupart des maladies et ravageurs épargnent le maïs insulaire. «Mais la hausse des surfaces cultivées s’accompagnera forcément d’une augmentation des maladies», avertit Dan MacEachern.

Un amateur de chaleur

Dans le futur, les conditions pourraient être encore plus favorables à la pousse de la céréale, croient les scientifiques. 

«À cause des changements climatiques, nous aurons des étés plus longs et plus chauds et le maïs aime la chaleur. C’est propice à sa croissance et donc à de bonnes récoltes», explique Yunfei Jiang.

«Il s’agit certainement d’une culture que nous pouvons utiliser pour nous adapter aux dérèglements climatiques» abonde dans le même sens Dan MacEachern.

Les changements climatiques pourraient néanmoins avoir des effets négatifs, prévient Yunfei Jiang. L’augmentation de la fréquence des phénomènes météorologiques extrêmes, des épisodes de sécheresse et d’inondation pourraient gâcher des récoltes.

Une étude, réalisée par des chercheurs américains en 2011, a par ailleurs montré que l’évolution des températures et des précipitations entre 1980 et 2008 a fait chuter les rendements moyens mondiaux des cultures de maïs de 3,8 %.

À l’Île-du-Prince-Édouard, Dan MacEachern et son équipe continuent de mener des recherches pour améliorer la qualité et la résistance des grains.  

2-Yunfei_Jiang.jpgSelon l’agronome Yunfei Jiang, la multiplication des phénomènes météorologiques extrêmes et des épisodes de sécheresse pourrait nuire à la production.

3-Neil_Campbell.jpgNeil Campbell explique que la production de maïs est rentable, malgré les fluctuations de prix.

4-champ_de_mais.jpgLes chercheurs d’Agriculture et Agroalimentaire Canada mènent des recherches sur le maïs afin d’améliorer la qualité et la résistance des grains.

5-Silo_-_grains.jpgLa Société des silos à grains de l’Île-du-Prince-Édouard possède trois silos dans la province, l’un à l’ouest, l’autre à l’est et un dernier à Kensington.

Abonnez-vous à La Voix acadienne pour recevoir votre copie électronique ou la version papier

Société