Une nouvelle aide financière vient d’être annoncée pour les personnes qui fuient les violences conjugales à l’Île-du-Prince-Édouard. Les organismes féministes saluent cette mesure, mais plaident pour un renforcement des moyens afin de mettre fin aux violences fondées sur le sexe.
Les Prince-Édouardiens qui doivent quitter leur domicile pour échapper à la violence conjugale pourront recevoir une aide gouvernementale pour payer leur loyer ou leur hypothèque. Le montant maximal est de 600 dollars par mois, ou 7 200 dollars par année.
Il s’agit d’une bonification de l’Allocation canadienne pour le logement. L’Île-du-Prince-Édouard s’est associée au gouvernement fédéral pour offrir ce soutien financier aux personnes survivantes.
Ottawa et le gouvernement provincial investissent chacun près de 6 millions de dollars dans cette initiative.
Selon la directrice générale du Réseau des femmes de l’Île-du-Prince-Édouard, Jillian Kilfoil, cette allocation permettra d’aider près de 200 personnes dans la provinc e.
La responsable se félicite de cette annonce, mais juge le montant d’argent «insuffisant» face au «coût des logements qui augmente chaque année».
«Avec la crise actuelle, il n’y a pas beaucoup de logements disponibles non plus, ça empêche les victimes de quitter des situations de violence», poursuit Jillian Kilfoil.
Un plan d’action national
Un avis que partage la directrice générale d’Actions Femmes ÎPÉ, Emmanuelle Billaux : «C’est un pas de plus pour aider les personnes à s’en sortir, mais ça ne résout pas le problème du manque de logements.»
En août 2023, la province avait déjà obtenu 9,6 millions de dollars du gouvernement fédéral pour mettre fin à la violence fondée sur le sexe sur les quatre prochaines années. Cet investissement d’Ottawa s’inscrivait dans le cadre d’un Plan d’action national décennal, annoncé en 2021.
«On est encore au début, mais on peut déjà voir de nouvelles lignes de financement disponibles pour les projets et les organismes qui travaillent sur la prévention et l’aide aux victimes» salue Jillian Kilfoil.
Le Réseau des femmes de l’Î.-P.-É. gère le projet d’engagement communautaire en lien avec la mise en œuvre du plan d’action dans la province.
Les organismes à but non lucratif, impliqués dans ce projet, ont d’ores et déjà identifié de nombreuses lacunes à combler, explique Jillian Kilfoil.
Elle évoque le besoin de stabilité financière des organismes qui luttent contre les violences, mais aussi la nécessité de mieux soutenir les employés de ces organisations souvent sans poste permanent et mal payés.
Améliorer la sensibilisation des jeunes
«Pour faire des changements systémiques, il faut arrêter les financements par projet, il faut des financements stables» abonde dans le même sens Emmanuelle Billaux.
Actions Femmes ÎPÉ participe également au projet et s’assure que la composante francophone soit prise en compte dans tous les dossiers.
«Malgré des avancements, l’accès à des services en français reste très compliqué, regrette Emmanuelle Billaux. Les femmes ont besoin d’utiliser leur langue maternelle dans des situations traumatisantes, parler en anglais leur demande un effort et donne un gros frein.»
De son côté, Jillian Kilfoil insiste sur l’importance de consacrer plus de temps et de ressources à la sensibilisation des jeunes aux relations saines : «On a besoin d’engager toute la communauté pour réduire les violences.»
«Nous avons aussi des discussions sur le revenu de base, car l’insécurité financière empêche beaucoup victimes de s’en sortir», ajoute-t-elle.
L’amélioration des conditions économiques des familles aux prises avec la violence conjugale est l’un des objectifs du plan d’action national.