Société
Par Marine Ernoult / IJL – Réseau.Presse – La Voix acadienne
Odette Cyr a été traductrice pendant 35 ans pour le gouvernement provincial et Mélanie Morin est traductrice depuis dix-huit ans à l’Île-du-Prince-Édouard. (Photos : Gracieuseté)

Le 30 septembre, c’est la Journée internationale de la traduction. Au Canada, pays officiellement bilingue, les spécialistes des langues sont un rouage essentiel dans le fonctionnement politique, social et économique que ce soit au niveau fédéral ou provincial. Deux traductrices de l’Île-du-Prince-Édouard reviennent sur leur travail et partagent leur vision de l’avenir de leur métier. 

«Notre travail contribue à créer des liens entre les communautés et les cultures, nous facilitons la communication et le partage du savoir», estime Mélanie Morin, traductrice depuis 18 ans à l’Île-du-Prince-
Édouard. 

«Dans un pays officiellement bilingue, nous garantissons non seulement la cohésion sociale et l’accès à la même information, mais nous aidons aussi à préserver l’égalité des droits et le patrimoine culturel», renchérit Odette Cyr, traductrice à la retraite. 

C’est l’amour des langues et de l’écriture qui ont poussé Mélanie Morin et Odette Cyr à choisir des carrières dans la traduction. 

«Si l’on connaît le français et l’anglais à fond, on est capable de tout traduire, c’est plus un savoir-faire qu’un savoir», assure Mélanie Morin. 

Dans son travail quotidien, la quadragénaire s’attache à la justesse du vocabulaire utilisé, aux subtilités sémantiques, à la qualité de l’écriture. 

Elle se casse parfois la tête sur des textes mal rédigés aux idées floues. Elle peut passer des heures sur des mots compliqués à traduire ou des anglicismes piégeux. 

Des langues vivantes à surveiller 

«Il faut éviter la traduction mot à mot et toujours adapter le texte à la culture de ceux qui vont le lire. Les gens doivent avoir l’impression que le texte a été rédigé dans leur langue maternelle», souligne Mélanie Morin. 

L’hiver dernier, elle a traduit de nombreux documents et communiqués de presse pour Les Jeux du Canada. En ce moment, elle travaille sur des programmes d’études pour les éducatrices en petite enfance. 

«J’aime la variété de ce que je fais, je découvre et j’apprends de nouvelles choses tout le temps», observe Mélanie Morin. 

«Les langues sont vivantes, elles évoluent tout le temps. Il faut toujours faire des recherches, se tenir au courant des nouveautés», poursuit Odette Cyr.

L’Acadienne a, elle, travaillé pendant 35 ans au gouvernement provincial. En 1986, elle est la première traductrice employée par la province. 

Passée notamment par les ministères de l’Industrie et de l’Éducation, elle a terminé sa carrière comme gestionnaire du service de traduction de la province. Elle a également aidé des ministres et des Premiers ministres à rédiger des discours en français. 

«Au début, les gens ne savaient même pas ce qu’on faisait, ils ne comprenaient pas le processus derrière, ils pensaient que c’était comme automatique», se souvient-elle. 

Menace de l’intelligence artificielle? 

Au fil des années, Odette Cyr voit son métier «prendre de l’importance» en même temps que la communauté francophone se développe. Le nombre de traducteurs augmente pour répondre aux besoins grandissants. 

Odette Cyr est également témoin des avancées technologiques qui font évoluer le métier : «Je suis passée des machines à écrire aux ordinateurs, puis aux traductions automatiques.»

«Ce genre d’outils nous facilite la tâche. Les logiciels sont capables d’aller chercher en très peu de temps beaucoup de mots et de phrases similaires déjà traduits», détaille Mélanie Morin. 

Avec l’avènement de l’intelligence artificielle, le métier est à nouveau en pleine mutation. Mais Odette Cyr et Mélanie Morin ne craignent pas la disparition de leur profession. 

«Les machines ne sont pas encore en mesure de nous remplacer. Elles ne sont pas capables de prendre en compte le contexte culturel et d’être vraiment fidèles au sens du texte de départ», affirme Mélanie Morin. 

Les deux traductrices préfèrent voir le côté positif des récents progrès techniques. «J’ai tellement de demandes que je suis obligée d’en refuser. Ces nouvelles ressources peuvent nous aider à être plus efficaces et à réduire notre charge de travail», considère Mélanie Morin. 

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