Communauté
Par Marine Ernoult / IJL – Réseau.Presse – La Voix acadienne
Emile Gallant a été président et directeur du Carrefour de l’Isle-Saint-Jean à plusieurs reprises.

En 1991, le Carrefour de l’Isle-Saint-Jean ouvre ses portes à Charlottetown.  Le centre scolaire-communautaire va devenir le point d’ancrage des francophones dans la capitale provinciale.  Emile Gallant, ancien directeur et président, et Charles Duguay, bénévole, reviennent sur trente ans d’activités et de défis.

Depuis trente ans, le Carrefour de l’Isle-Saint-Jean est l’un des lieux de rencontre privilégiés des francophones de la région de Charlottetown.  Avant sa création en 1991, il n’existait pas d’espace unique réunissant l’école française François-Buote et le centre communautaire.  «L’idée était d’avoir tous les services sous le même toit, un espace pour prendre notre place», explique Emile Gallant, le premier président du Carrefour.  Celui qui a aussi été directeur à deux reprises se souvient encore de l’opposition d’une partie de la communauté anglophone à l’ouverture. 

«C’était un lieu où on pouvait enfin se regrouper et vivre en français», témoigne Charles Duguay, bénévole, impliqué depuis le début.  «Un endroit où on tissait des liens, où on créait des amitiés, c’est même là où j’ai rencontré mon épouse», abonde Emile Gallant.  Dès les origines, le Carrefour propose de nombreuses activités culturelles et sportives, du théâtre, des cinq à sept, ou encore des célébrations à l’occasion du 15 Août.

Une communauté encore fragile 

Au fil des années, le Carrefour a contribué à forger le sentiment d’appartenance à une communauté francophone.  Mais les débuts n’ont pas été faciles.  «Ça a été un défi, les francophones qui se croisaient dans la rue préféraient se parler en anglais, on était vraiment une infime minorité perdue dans un environnement anglophone», rappelle Charles Duguay.

Le bénévole se souvient d’une des premières parades de Noël à laquelle le Carrefour a participé.  Le char du centre scolaire-communautaire, pavoisé aux couleurs de l’Acadie, circulait au son de musique française.  «Sur notre chemin, les spectateurs frappaient des mains, dansaient, et à ce moment-là, je me suis dit qu’on avait fait un bout de chemin depuis l’époque où on ne voulait pas se parler en français par peur de la réaction des anglophones», raconte-t-il.  Selon Charles Duguay, l’autre «belle réalisation» du Carrefour, c’est la garderie : «Ça a mis de la vie dans le centre tout en nourrissant le côté scolaire». 

Encore aujourd’hui, la communauté reste fragile aux yeux des deux Acadiens.  «Beaucoup de francophones installés à Charlottetown sont des gens de passage qui ne restent que quelques années, c’est une communauté en perpétuelle transition», commente Charles Duguay.  Le défi pour les attirer au Carrefour est d’autant plus grand. 

Charles Duguay est un bénévole impliqué depuisle début dans les activités du Carrefour.  (Photos : Archives de La Voix acadienne)

Attirer plus de jeunes 

«Il faut s’adapter et proposer des activités diversifiées qui intéressent une communauté multiculturelle, les gens viennent désormais du monde entier», observe Emile Gallant.  L’ancien directeur s’inquiète par ailleurs du «fort roulement» au niveau du personnel.  «C’est pourtant essentiel de connaître son public pour développer des projets adéquats, ça prend de la continuité», souligne-t-il. 

L’autre enjeu, c’est de faire venir plus de jeunes.  «Avec l’École François-Buote qui ne cesse de s’agrandir, j’aimerais voir une plus grande participation», partage Charles Duguay.  «Les jeunes sont entourés d’anglais, ça demande plus d’efforts de les réunir autour du français», reconnaît de son côté Emile Gallant.  «Mais on doit tout faire pour qu’ils prennent la relève, qu’ils développent un attachement profond à la francophonie, un amour de la culture et de la langue», ajoute-t-il. 

Le rêve d’Emile Gallant, c’est de faire du Carrefour de l’Isle-Saint-Jean un lieu qui réunit tous les organismes et services en mesure de répondre aux besoins des francophones.  Autrement dit, médecins, commerces et entreprises pourraient élire domicile dans les locaux du centre scolaire-communautaire.  Mais pour cela, il faudra pousser les murs. 

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