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Par Marcia Enman
Éveline Poirier, la première rédactrice de La Voix Acadienne, vit en Alberta aujourd’hui. Elle garde de beaux souvenirs de son travail au journal qu’elle a vu naître. (Photo : Gracieuseté)

Une étudiante diplômée d’un baccalauréat en psychologie de l’Université de Moncton nommée Éveline Poirier postule pour un poste de rédactrice d’un projet d’été afin de produire quelques numéros d’un journal pour la communauté acadienne de l’Île-du-Prince-Édouard en 1975. 

Éveline a accepté de nous parler de comment  tout a commencé.  C’était le Père Pierre Arsenault qui a fait son embauche au nom de la Société Saint-Thomas-d’Aquin. Le bureau d’Éveline se trouvait dans l’école de Wellington et avec elle, dans l’équipe, se trouvaient le journaliste Robert Arsenault et Rosemonde Léger qui s’occupait de dactylographier les textes. Il y avait aussi Jeanne Maddix qui travaillait à un point dans la petite équipe. 

Lors de son entrevue pour le poste, on proposait deux parutions pendant l’été, mais Éveline, ayant beaucoup plus d’initiatives, indique qu’elle acceptera le poste si l’on fait au moins 5 publications.  Il s’agissait de produire une publication toutes les deux semaines. La première rédactrice du journal est aussi celle qui a nommé le journal qui porte encore ce nom aujourd’hui. À l’époque c’était La Voix Acadienne de l’Île-du-Prince-Édouard, qui a aujourd’hui changé un tout petit peu pour La Voix acadienne, votre journal francophone de l’Île-du-Prince-Édouard.

Un retour à l’arrière

«On avait prévu au début de produire 4 ou 8 pages par édition, mais finalement, nous en avons fait 12 pages par publication», souligne Éveline Poirier lors d’un entretien téléphonique d’Edmonton en Alberta où elle habite maintenant depuis plusieurs années.

Puisque le journal anglophone local voyait le nouveau journal La Voix Acadienne comme rival, ce journal n’a pas accepté d’aider avec la mise en page.  «Je devais partir en avion toutes les deux semaines pour me rendre à Yarmouth en Nouvelle-Écosse afin de recevoir de l’aide de son directeur et de l’équipe du Petit Courrier.  Un vol jusqu’à Halifax, une attente de plusieurs heures avant de prendre le deuxième vol pour me rendre à Yarmouth.  Une fois là, le gentil rédacteur du Petit Courrier, du nom de Cyril LeBlanc venait me rencontrer avec tous mes textes du journal dans mon porte-feuilles et ma petite valise puisque je devais y passer deux nuits », explique la rédactrice de La Voix Acadienne.  «La secrétaire du Petit Courrier devait retaper tous les textes sur une machine (Offset) qui sortait les textes en colonnes et là, moi et d’autres membres de l’équipe du Petit Courrier, on collait les textes en colonnes sur de grandes pages (grandeur journal) pour ensuite le ramener à l’Île ou l’imprimeur anglophone avait accepté de l’imprimer. 

«Pour la mise en page des annonces, c’était encore un plus gros défi, il fallait utiliser une machine et y inscrire une lettre à la fois pour arriver à faire une mise en page de chacune des publicités.  C’était long!», explique Éveline.

«Toute l’équipe est descendue à Yarmouth pour la mise en page du dernier numéro de l’été.  Robert Arsenault a pris son auto et nous a emmené. C’était un moyen pour toute l’équipe de voir comment on faisait la mise en page», ajoute Éveline.

«Une fois de retour à l’Île et les 3 000 copies imprimés, c’était le temps d’en faire la distribution gratuite de Tignish à Souris en dépôt dans plusieurs magasins, boutiques et aussi par la poste aux membres de la Société Saint-Thomas-d’Aquin en plus que l’on se rendait à Borden pour le distribuer aux visiteurs qui nous arrivaient sur le traversier, particulièrement ceux avec une plaque du Québec», ajoute Éveline.

«En plus de m’occuper de la rédaction de textes, je m’occupais aussi de la vente des publicités et de m’assurer que tout était prêt pour le départ à Yarmouth aux deux semaines.  Je me souviens que Jean Doiron venait aux deux semaines pour faire la vérification finale des textes», indique Éveline.  Jean Doiron est devenu rédacteur en chef du journal quand La Voix Acadienne est devenue hebdomadaire en 1976.

Pour Éveline, une fois l’été passé et que son travail du projet de la création d’un journal a été réalisé, elle est retournée aux études comme elle l’avait prévu.  Elle retourne à l’Université de Moncton pour faire sa maîtrise au programme d’orientation scolaire. À la suite, elle accepte un poste comme conseillère d’orientation à l’École Racette à Saint-Paul en Alberta.  Présentement elle habite Edmonton d’où elle travaille à temps partiel à faire de la recherche et du mentorat auprès d’étudiants qui font leur maîtrise ou leur doctorat à l’Université Queens (Kingston, Ontario).

«Dans toute ma carrière, mon travail au journal a été l’une des choses que j’ai été la plus fière d’avoir accomplies. Mon père Dosithée m’a toujours dit : ton travail, tu le fais bien ou pas la peine de le faire et d’y signer ton nom! Des mots que je n’oublie jamais. J’ai toujours cru que le peuple acadien avait le droit de s’affirmer et les pages du journal sont devenues un excellent moyen de le réaliser.  Par ce moyen, les Acadiens ont été mieux informés et ont été capables de mieux collaborer ensemble et d’arriver à mieux se connaître d’un bout à l’autre de la province», conclut Éveline.

Éveline Poirier a aussi écrit dans le journal l’Évangéline du Nouveau-Brunswick quand elle était en 11e et 12e années à l’École Évangéline.  Un journaliste de ce journal, Paul Émile Bourque était venu à l’Île à la recherche de quelqu’un pour écrire des nouvelles des Acadiens de l’Î.-P.-É.  On voulait essayer de percer un marché pour ce journal à l’Île.  «C’est là que je peux dire que j’ai vraiment eu le goût de l’écriture», souligne-t-elle.

«Au fil des années, quand on me demandait quel genre de travail j’avais occupé par le passé, j’expliquais toujours avec grande fierté que mon travail à La Voix Acadienne et voir son lancement hebdomadaire, c’était le rêve devenu réalité!», indique Éveline.

Au nom de La Voix acadienne, nous tenons à remercier cette dame à qui l’on doit certainement la naissance de ce journal. 

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