Société
Par Jacinthe Laforest
On peut consulter le jugement au www.canlii.org/fr/ca/csc/doc/2000/2000csc1/2000csc1.html.

C’est le 13 janvier 2000 que la Cour suprême du Canada a confirmé le droit des parents de la minorité linguistique à une école dans leur langue dans leur communauté.  25 ans plus tard, le jugement Arsenault-Cameron reste un joyau de la jurisprudence en matière de droit à l’enseignement dans la langue de la minorité.

Président de la Commission scolaire de langue française, Gilles Benoit habitait au Nouveau-Brunswick durant les années qui ont précédé la parution du jugement Arsenault-Cameron en janvier 2000.  «Bien sûr on en parlait.  C’était spécial que deux parents et une commission scolaire poursuivent leur gouvernement.  Ce jugement a eu un très grand impact dans toute l’Île, et ailleurs au Canada aussi.  Depuis 25 ans, il a continué d’être analysé et d’enrichir la jurisprudence.  D’ailleurs, notre double mandat (scolaire et développement identitaire-communautaire) à la commission scolaire découle d’une de ces interprétations», rappelle Gilles Benoit.

Extrait du jugement 

Voici le paragraphe 50 du jugement Arsenault-Cameron : Les questions de transport auraient dû être appliquées différemment dans le cas des enfants de la minorité linguistique pour au moins deux raisons.  Premièrement, contrairement aux enfants de la majorité linguistique, les enfants visés par l’art. 23 devaient faire un choix entre fréquenter une école locale dans la langue de la majorité et fréquenter une école moins accessible dans la langue de la minorité.  La décision du ministre créait une situation qui avait pour effet de dissuader de nombreux enfants visés par l’art. 23 de fréquenter l’école de la minorité linguistique en raison de la durée du transport.  Un tel facteur dissuasif n’existerait pas dans le cas des enfants de la majorité.  Deuxièmement, le choix de transporter les élèves aurait une incidence sur l’assimilation des enfants de la minorité linguistique tandis que les modalités de transport n’avaient aucune répercussion culturelle sur les enfants de la majorité linguistique.  Pour la minorité, il s’agissait en grande partie d’une question culturelle et linguistique; il s’agissait non seulement de la durée des trajets, mais aussi des distances parcourues du fait qu’il fallait envoyer les enfants à l’extérieur de leur communauté et qu’il n’y avait pas d’établissement d’enseignement au sein de la communauté même.  Comme nous venons tout juste de le mentionner, le transport est un moyen possible d’assurer des services aux enfants de la minorité linguistique officielle, mais il faut l’examiner dans le contexte des considérations pédagogiques et des coûts liés à l’application de l’art. 23.

25 ans plus tard, encore le transport

Lors de leur rencontre du mois de décembre 2024, les dirigeants de la Commission scolaire de langue française ont ouvert la porte à l’idée d’une septième école, pour tenter de raccourcir le temps de transport des élèves vers l’école française la plus proche.  

«Après le jugement Arsenault-Cameron, la CSLF a fait des études démographiques entre autres pour Rustico et Kings-Est, afin de déterminer le potentiel.  Nous allons probablement utiliser à nouveau cet outil (études démographiques) parce que nous ne pouvons pas accepter que des enfants passent 90 minutes dans l’autobus chaque matin et chaque soir, mais il faut aussi qu’il y ait une demande des parents», précise Gilles Benoit.  

De manière plus générale, le président de la Commission scolaire de langue française rappelle l’importance de manifester en tout temps sa fierté de parler français, surtout lorsque «nous sommes entre francophones», dit-il et «en présence de jeunes».  

«Il y a des gens qui ont beaucoup sacrifié pour que nous ayons nos écoles.  Il n’y avait pas de chemin tracé.  Ce n’était pas facile.  Ils se sont tenus debout et le résultat est là.»

Et l’argent?

Gilles Benoit raconte cette petite anecdote qui remonte à environ deux ans.  En conversation avec un haut fonctionnaire du gouvernement actuel, ce fonctionnaire est revenu sur l’époque où le jugement a été rendu.  «Il m’a raconté qu’ils se sont réunis d’urgence.  Il n’y avait pas plus d’argent à ce moment-là qu’il y en a à présent.  Puis quelqu’un dans leur groupe aurait dit : argent ou pas, il faut agir.  Et par la suite, au Canada, des jugements ont précisé que le manque d’argent ne pouvait pas être une raison pour refuser son droit à la minorité de langue officielle», a raconté Gilles Benoit.  

 



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