De nombreuses araignées, en pleine période de reproduction, ont élu domicile près des maisons de l’Île-du-Prince-Édouard. Loin d’être les créatures inquiétantes ou dangereuses que l’on voit dans certains films, ces arachnides ont une réelle utilité écologique et jouent un rôle important dans la chaîne alimentaire.
Les araignées sont particulièrement visibles en ce début d’automne aux abords des maisons et dans les jardins.
Environ 205 espèces sont présentes dans la province. L’épeire diadème, reconnaissable au motif sur son abdomen couleur chocolat qui évoque la croix d’un diadème, est l’une des plus communes.
Selon la biologiste à la retraite, Rosemary Curley, leur nombre est probablement sous-estimé, car les araignées «sont très difficiles à identifier.»
«La plupart des spécimens que nous voyons à cette époque de l’année sont des femelles, poursuit la scientifique. Elles sont plus grosses et les gens les remarquent davantage parce qu’elles sont pleines d’œufs et qu’elles s’apprêtent à les pondre.»
Les araignées ne s’accouplent qu’une seule fois dans leur vie. La reproduction est périlleuse, car les femelles, généralement beaucoup plus grosses que les mâles, pratiquent le cannibalisme sexuel. Le mâle doit donc se distinguer des autres proies et amadouer sa partenaire.
Cannibalisme sexuel
Pour éviter le territoire périlleux où la femelle piège ses proies, le mâle tisse un fil d’accouplement entre la toile et un support voisin. Pour signaler sa présence, il communique par des vibrations, grâce à un organe sensoriel situé sur ses pattes.
«Les mâles ont généralement une vie assez courte et leur principale fonction est de féconder les femelles», relève Rosemary Curley.
Après l’accouplement, la femelle se retire quelques jours, puis tisse un cocon où elle pondra de 300 à 900 œufs qu’elle cachera avant de mourir.
«Il y a quelques petites araignées qui passent l’hiver près de la surface du sol, sous la neige, mais la plupart meurent», confirme Rosemary Curley.
Seuls les petits feront leur sortie au printemps. Chacun tissera un fil très léger qui se dispersera au loin en profitant des courants d’air ascendants.
Rosemary Curley insiste sur l’utilité écologique de ces bêtes mal aimées qui ont souvent mauvaise réputation : «Ce sont de redoutables prédateurs, elles engloutissent de grandes quantités d’insectes nuisibles pour les cultures ou vecteurs de maladies.»
Ennemi public numéro un des insectes
En moyenne, on estime qu’une araignée dévore chaque jour l’équivalent de 10 à 20 % de son propre poids. D’après une étude parue en 2017, à l’échelle mondiale, elles sont capables de manger plus de 400 millions de tonnes de bestioles par an, l’équivalent de la consommation de l’humanité entière en viande et en poisson.
Les insectes restent collés aux fils de soie des toiles d’une solidité exceptionnelle. Les vibrations produites par la proie qui se débat pour se libérer alertent l’araignée. Celle-ci possède sur ses pattes des poils spéciaux anti-adhésifs, évitant ainsi d’être prise à son propre piège.
Les araignées ne pouvant ingérer que du liquide, elles doivent soit broyer leurs proies afin d’en faire de la bouillie, soit pratiquer une sorte de pré-digestion externalisée. Elles injectent des enzymes dans le corps des animaux qu’elles ont tués et en aspirent ensuite le contenu liquéfié.
En 2021, une équipe de chercheurs américains a documenté toutes les étapes de la construction d’une toile. À l’aide de leurs huit pattes, les araignées les construisent à l’aveugle en utilisant le sens du toucher. Les scientifiques ontdémontré que les règles pour tisser les toiles sont codées dans le cerveau des arachnides.
«Leurs facultés sont exceptionnelles et, à l’île, nous n’avons pas d’espèces dangereuses, il ne faut pas en avoir peur», souligne Rosemary Curley.
Il y a environ 205 espèces d’araignées à l’Île-du-Prince-Édouard. (Photo : Marine Ernoult)
La biologiste Rosemary Curley explique que la plupart des araignées meurent à la fin de l’automne. (Photo : Gracieuseté)