Le 27 février, des cas de grippe aviaire ont été détectés chez des oiseaux sauvages à l’est de l’Île-du-Prince-Édouard. Les risques de transmission à la population sont pour l’instant faibles. Les experts invitent néanmoins à la prudence, car le virus H5N1 circule intensément aux États-Unis. Nos voisins du sud ont récemment rapporté un premier décès humain lié au virus.
Fin février, un grand nombre de bernaches du Canada ont été retrouvées mortes ou mourantes à Vernon Bridge dans l’est de l’Î.-P.-É. Selon les résultats préliminaires, il s’agirait du virus H5N1, plus connu sous le nom de grippe aviaire.
La maladie a été détectée pour la première fois à l’île en mars 2022 dans les tissus d’un pygargue à tête blanche trouvé sur la côte nord.
«Ce n’est pas surprenant, le virus est présent partout, dans plus de 100 pays», observe le professeur en médecine vétérinaire à l’Université de Montréal, Jean-Pierre-Vaillancourt.
L’expert explique que 489 espèces d’oiseaux sauvages et domestiques peuvent être affectés par le virus.
«Mais il n’y a pas beaucoup de fermes avec des oiseaux domestiques à l’île, il n’y a donc pas de foyers de ce côté-là», affirme-t-il.
«Pas de grand danger pour les Insulaires»
«À ce stade, il n’y a pas de grand danger pour les Insulaires. Le risque d’infection humaine est possible, mais très faible», ajoute le chef de la lutte contre les infections au Collège vétérinaire de l’Atlantique à Charlottetown, Jason Stull.
Les cas de transmission de la grippe aviaire aux humains surviennent habituellement après un contact «assez étroit» avec des oiseaux infectés, dans les élevages de poulets et de dindes ou dans des abattoirs, selon Jean-Pierre-Vaillancourt.
Jason Stull conseille néanmoins de limiter les contacts avec des animaux sauvages, «en particulier ceux qui sont malades ou morts».
«Si les gens ou les animaux de compagnie fréquentent des zones contaminées, le virus présent dans les excréments peut s’accrocher à leurs bottes ou à leurs pattes», détaille-t-il.
Des cas de grippe aviaire ont également été signalés chez des volailles à Terre-Neuve à la mi-février. Ailleurs dans les provinces de l’Atlantique, 12 000 oiseaux avaient été infectés en Nouvelle-Écosse en 2022.
Entre les premières détections en 2021 et le 31 janvier 2025, près de 14 500 000 volatiles ont été affectés par la grippe aviaire au Canada. Le virus circule donc à bas bruit dans les populations d’oiseaux sauvages et s’invitent à l’occasion de contaminations accidentelles dans des élevages de volaille.
«Nous sommes inquiets que le virus puisse muter d’une manière qui facilite sa transmission d’une personne à l’autre», observe Jason Stull. (Photo : Gracieuseté)
Premier cas humain en Colombie-Britannique
«Présentement, tous les sites infectés ont été mis en quarantaine et on a euthanasié tous les oiseaux domestiques infectés au pays, mais il faut rester prudent», insiste Jean-Pierre-Vaillancourt.
Un premier cas humain de H5N1 a en effet été enregistré au Canada en fin d’année dernière. Il s’agissait d’une adolescente de Colombie-Britannique, âgée de 13 ans, qui a passé plusieurs semaines aux soins intensifs avant de pouvoir sortir de l’hôpital. Les autorités disent ne pas savoir comment elle a été contaminée.
Aux États-Unis voisins, les signaux d’alerte se multiplient. L’épizootie – c’est-à-dire une épidémie parmi les animaux – de grippe aviaire se propage à toute vitesse dans les élevages de bovins et de volailles. Un porc a également été testé positif en octobre dernier dans l’Oregon.
Début janvier, la Louisiane a rapporté un premier décès humain lié à la grippe aviaire. Le malade, âgé de plus de 65 ans, était le premier cas grave détecté dans le pays et souffrait d’autres pathologies. Il avait été contaminé par des oiseaux de basse-cour et sauvages.
Quelque 70 cas de grippe aviaire chez l’homme ont été détectés aux États-Unis depuis le début de 2024, l’extrême majorité étant bénins.
«Mais d’autres pourraient être passés inaperçus, on peut juste avoir des symptômes de conjonctive. À date, on n’a aucune idée de combien de personnes ont réellement été infectées», remarque Jean-Pierre Vaillancourt.
Achat de 500 000 doses de vaccin
Si aucune propagation de la maladie entre humains n’a été pour l’instant documentée, le niveau de circulation du virus inquiète les experts.
«La transmission d’humain à humain paraît assez imprévisible, reconnaît Jean-Pierre Vaillancourt. Le risque est faible, mais l’an dernier, je vous aurais dit qu’il était très faible, ça veut dire qu’il augmente.»
«Nous sommes inquiets que le virus puisse muter d’une manière qui facilite sa transmission d’une personne à l’autre», renchérit Jason Stull.
Face à cette menace grandissante, l’Agence de la santé publique du Canada vient d’acheter 500 000 doses de vaccin pour protéger les personnes les plus exposées, que ce soient les vétérinaires ou les employés qui travaillent dans des élevages ou des abattoirs.
Dans les semaines à venir, 60 % des doses seront distribuées aux provinces et aux territoires, le reste sera stocké par Ottawa. À l’ÎPÉ, le bureau du médecin hygiéniste en chef déterminera qui pourra se faire vacciner.