Santé
Par Marine Ernoult / IJL – Réseau.Presse – La Voix acadienne
Jonathan Zalewski du ministère de l’Éducation veut donner aux jeunes «les bons réflexes» en matière de sexualité et de relations saines.  (Photo : Gracieuseté)

Alors qu’au pays la hausse des cas de sida inquiète, l’épidémie ne progresse pas à l’Île-du-Prince-Édouard. Les associations alertent néanmoins sur la hausse des comportements à risque et la banalisation de la maladie. Elles pointent également une sensibilisation insuffisante des jeunes dans les écoles.

Le nombre de cas de VIH (virus de l’immunodéficience humaine) reste stable dans la province depuis 2018. Selon le bureau provincial de la santé publique, ces six dernières années, entre trois et sept nouveaux cas ont été diagnostiqués annuellement. 

«Il n’y a pas d’augmentation, mais il n’y a pas non plus de diminution, ce qui est pré-occupant», nuance la personne responsable de la coordination de la santé sexuelle des hommes au sein de P.E.E.R.S. Alliance, Scott Alan.

Et d’ajouter : «Il y a encore beaucoup de stigmates autour de la séropositivité qui empêchent les gens de recevoir les traitements dont ils ont besoin.»

L’Île-du-Prince-Édouard est cependant l’une des rares provinces au pays à offrir gratuitement une pilule préventive antisida (dite PrEP) pour les individus séronégatifs très exposés au VIH. 

La province offre également un traitement d’urgence donné à une personne séronégative après une prise de risque élevée afin d’éviter la transmission du virus. Ce traitement post-exposition doit être débuté au plus tard quarante-huit heures après la prise de risque et dure un mois.

Scott Alan reconnaît que de tels médicaments, «contribuent à maintenir la maladie à un niveau constant.»

Ne pas oublier la prévention

À l’échelle nationale, la situation est encore plus inquiétante, avec une épidémie qui repart à la hausse. L’Agence de la santé publique du Canada rapporte que 2 434 Canadiens ont reçu un diagnostic de VIH en 2023. 

Il s’agit d’une augmentation de 35 % par rapport à l’année précédente, qui s’était soldée par 1 833 nouvelles infections. Les individus âgés de 25 à 39 ans représentent la vaste majorité de ces nouveaux malades.

Selon Scott Alan, plusieurs facteurs peuvent expliquer cet accroissement des cas. La personne évoque des taux de dépistage en hausse, «après avoir baissé pendant la pandémie de COVID-19», ainsi qu’une  banalisation de la maladie. 

«Nos jeunes n’ont pas vécu l’épidémie et vu leurs amis mourir à côté d’eux, détaille Scott Alan. Ça les amène à adopter une attitude plus positive et insouciante en matière de sexualité, c’est très bien, mais ils oublient la prévention et prennent des risques.»

Scott Alan mentionne par ailleurs l’utilisation dangereuse de substances injectables, comme le partage de seringues et d’aiguilles, qui augmente les risques de propagation du VIH. 

«C’est pour ça que les centres d’injection supervisés avec des aiguilles propres à disposition sont absolument essentiels», insiste Scott Alan. 

Pour lutter contre l’épidémie de sida, P.E.E.R.S. Alliance appelle à renforcer l’éducation à la sexualité dans les écoles. 

Aucun cours au secondaire

Dans les établissements de la Commission scolaire de langue française (CSLF), seuls les élèves de l’intermédiaire entendent parler de santé sexuelle, principalement dans le cadre des cours de formation personnelle et sociale.

En 7e année, ils découvrent les différents moyens de contraception et leur efficacité, tandis qu’en 8e année, ils étudient les infections sexuellement transmissibles et les comportements responsables pour éviter de les contracter. En 9e année, l’accent est mis sur la prise de décision éclairée, le consentement et les relations saines. 

«Les jeunes ne sont peut-être pas sexuellement actifs à cet âge, mais on veut les mettre au courant, leur donner les bons réflexes», explique le responsable du bien-être dans les programmes en français au sein du ministère provincial de l’Éducation, Jonathan Zalewski. 

«Ça peut heurter certaines croyances, mais toutes les études montrent que parler d’abstinence ne fonctionne pas», ajoute-t-il. 

Au secondaire, c’est là où le bât blesse. Entre la 10e et la 12e année, l’éducation sexuelle est absente des programmes. Conscient des lacunes, Jonathan Zalewski assure travailler «prioritairement» à l’élaboration de nouveaux cours. 

«Il faut vraiment renforcer l’éducation, que ce soit obligatoire et en parler le plus souvent possible, pas seulement une fois par an» appuie Scott Alan. 

Il y a urgence, toutes les infections sexuellement transmissibles font un retour alarmant au pays.  

2-Scott_Alan.jpgScott Adams ,de P.E.E.R.S ,estime que les jeunes d’aujourd’hui n’ont pas vécu l’épidémie de sida et ne réalisent plus les dangers du virus.  (Photo : Gracieuseté)


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