- Femmes des premières lignes -
Le 23 juin 2020
- Par Marine Ernoult
Catherine Morrell est entourée de ses collègues Evelyn Ramsay (à gauche) et Karen MacNeill (à droite). Une quarantaine de nettoyeurs travaillent à l’hôpital Prince County à Summerside. «Sans nous, les patients ne pourraient pas rester à l’hôpital et les soignants ne pourraient pas travailler dans un environnement sain», témoigne Catherine Morrell.
• NDLR : Actions Femmes Î.-P.-É., vous présente les chroniques «Femmes des premières lignes», des portraits de femmes qui occupent des emplois essentiels pendant la pandémie. Des chroniques pour mettre des visages sur ces métiers de l’ombre, bien souvent peu reconnus, parfois même très précaires et principalement occupés par des femmes. En donnant la parole à ces travailleuses, nous souhaitons valoriser ces métiers afin d’apporter un peu plus de reconnaissance à ces femmes essentielles, que ce soit pendant la pandémie ou en temps normal. •
Catherine Morrell travaille dans l’ombre de l’hôpital Prince County à Summerside. Nettoyeuse depuis quinze ans, l’Acadienne de 61 ans s’active derrière les soignants. La pandémie a révélé l’importance de son métier. Sans elle et ses collègues, l’hôpital ne tournerait pas.
Catherine Morrell ne porte pas de blouse blanche, mais elle prend soin des soignants à sa manière. Elle est partout, mais les patients la croisent à peine, ne la devinent que de loin ou ne la voient pas du tout. À 61 ans, elle est un rouage essentiel et invisible d’un hôpital qui ne fonctionnerait pas sans son travail. Depuis quinze ans, l’Acadienne, originaire du Nouveau-Brunswick, nettoie l’hôpital de Prince County à Summerside.
Son travail, et celui de sa quarantaine de collègues sont plus que jamais indispensables par les temps infectieux qui courent. «Avec la pandémie, les gens réalisent vraiment l’importance de notre métier, apprécie la sexagénaire. Sans nous, les patients ne pourraient pas rester à l’hôpital et les soignants ne pourraient pas travailler dans un environnement sain».
Le coronavirus a bouleversé son activité. «La vie a complètement changé», glisse la Prince-Édouardienne d’adoption, arrivée il y a 21 ans dans la province. Quand la crise a éclaté, il a fallu repenser toute la structure de l’hôpital, délimiter des zones COVID et non-COVID avec notamment des chambres en isolement. Les premières semaines, des patients étaient renvoyés chez eux, des salles d’opération étaient fermées.
Augmentation de la charge de travail
«Au début, tout le monde avait peur, personne ne savait ce qu’était ce virus, si on était malade ou pas, on ne s’approchait pas les uns des autres», raconte Catherine Morrell. La nettoyeuse craignait parfois de ramener le virus à la maison, mais elle a tenu. Formée aux règles d’hygiène, aux procédures à suivre et aux comportements à adopter en présence d’un patient atteint de la COVID-19, elle se sent désormais prête si un cas se déclarait. «Je serais nerveuse, mais je n’aurais pas peur», assure-t-elle.
Affectée au service de la maternité, Catherine Morrell est là, de 7 h à 15 h, derrière son masque, sa blouse, sa charlotte et ses gants. Du lundi au vendredi et une fin de semaine sur deux, elle désinfecte les couloirs et les chambres, la cuisine, les poignées de porte, les lumières, les interrupteurs, les rampes, les murs, les boutons d’ascenseur, les toilettes, les ordinateurs, etc. «Les gens touchent à tout, je nettoie tout.» Elle ramasse aussi les poubelles et le linge sale. Avec la menace de la COVID-19, «la charge de travail a augmenté», il faut nettoyer plus souvent. «Le monde nous demande et les patients regardent notre manière de faire, ce n’était pas le cas avant», constate l’Acadienne.
«Je ne m’arrête jamais, je travaille tout le temps»
Catherine Morrell souffre du manque de relations sociales avec ses collègues. Le nombre de personnes dans une pièce étant limité pour respecter la distanciation sociale, elle ne peut plus prendre ses pauses et ses repas avec eux. «C’est un grand changement, on avait l’habitude de se voir et de manger ensemble, ce sont des amis», confie-t-elle.
Pour la nettoyeuse, la période a surtout renforcé les liens entre soignants et non-soignants. «On discute avec les docteurs, les infirmiers, on est une équipe face à la COVID-19, car tout le monde peut être touché», témoigne-t-elle. Hors des murs de l’hôpital, de retour à la maison, Catherine Morrell retrouve son mari et un nouveau travail l’attend. Elle enchaîne les courses, la cuisine et le ménage avant une brève nuit de sommeil. Chaque matin, elle se lève à 5 h : «Je ne m’arrête jamais, je travaille tout le temps».