Dans le cadre du processus de redécoupage des circonscriptions électorales du Canada, l’Île-du-Prince-Édouard conserve ses quatre circonscriptions. Cependant, la Société acadienne et francophone de l’Île s’inquiète de la possible dilution du poids démographique francophone, en particulier pour la circonscription d’Egmont.
Après chaque recensement décennal, comme celui de 2021, le nombre de sièges à la Chambre des communes est recalculé afin de tenir compte des changements dans la population canadienne. Le directeur général des élections effectue le calcul à partir des estimations de la population fournies par le statisticien en chef du Canada et d’une formule prévue dans la Constitution. Aussi appelé redécoupage des circonscriptions fédérales, ce processus a commencé en février 2022, à la publication des chiffres de la population du recensement de 2021 par Statistique Canada. Les travaux sont menés par des commissions indépendantes et non partisanes constituées dans chacune des dix provinces.
«À la SAF’Île, nous avons participé aux audiences publiques et nous y avons présenté nos préoccupations. En gros, ce que j’ai appris, lors de cette rencontre, dit Isabelle Dasylva-Gill, c’est que le calcul qu’ils font est essentiellement mathématique, de manière à égaliser le plus possible le nombre de personnes par circonscription», affirme la directrice générale de la Société acadienne et francophone de l’Île-du-Prince-Édouard (SAF’Île).
Pour la SAF’Île, un calcul purement mathématique ne tient pas compte de la réalité linguistique et du risque qu’un redécoupage fait peser au poids démographique des francophones, en particulier dans la circonscription d’Egmont.
«Les nouvelles frontières proposées placent la communauté de Bedeque, une collectivité essentiellement anglophone, à l’intérieur de la circonscription d’Egmont. Nous n’avons pas encore les données linguistiques qui seront publiées en août prochain, mais de facto, en ajoutant une collectivité presque exclusivement anglophone dans Egmont, on dilue davantage le poids démographique et politique des francophones. Notre poids est déjà fragile, nous ne pouvons pas le laisser se diluer davantage. En plus de retombées immédiates, ça créerait un précédent qui pourrait mener à une érosion de notre poids démographique dans les circonscriptions», dit Isabelle Dasylva-Gill.
Au terme de sa participation à l’audience publique de la commission sur les circonscriptions électorales, plus tôt ce printemps, la SAF’Île a obtenu que la décision finale, en ce qui concerne l’Île-du-Prince-Édouard, ne soit prise qu’après la publication des données linguistiques du recensement de 2021, publication attendue vers la mi-août.
Données linguistiques attendues avec impatience
«Nous nous sommes engagés à fournir à la commission une analyse linguistique des conséquences de leurs décisions éventuelles sur la francophonie de l’Île au plus tard à la mi-septembre et ils ont accepté d’attendre. Nous avons très hâte que les données linguistiques sortent», ajoute la DG.
Traditionnellement, le recensement se fondait surtout sur les questions touchant la langue maternelle, en l’occurrence, le français, pour déterminer les aires et les niveaux de service, etc. Le recensement de 2021 a proposé des questions différentes et les données linguistiques sont attendues avec impatience.
«Ça fait au moins 30 ans que la francophonie de l’Île se transforme. C’est toujours intéressant de connaître la proportion de gens qui sont de langue maternelle française, mais la réalité est que toutes les personnes qui vivent en français, qui vont à l’école en français, qui enseignent le français, qui contribuent à la francophonie de l’Île, qui occupent des postes bilingues au gouvernement, ne sont pas de langue maternelle française. Nous pensons que la formule de calcul pour les données de 2021 donnera un portrait plus réaliste de la vitalité de la francophonie de l’Île et sa répartition géographique», soutient Isabelle Dasylva-Gill.