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Par   Marine Ernoult / IJL – Réseau.Presse – La Voix acadienne - ATL
Les tiques à pattes noires, présentes à l’Î.-P.-É., peuvent être porteuses de la maladie de Lyme. (Photo :  Pexels, Erik Karits)

L’Île-du-Prince-Édouard n’échappe pas aux tiques. Stimulées par le réchauffement climatique, les populations sont même en augmentation. Cette hausse est prise très au sérieux, car les tiques sont porteuses de maladies dangereuses pour l’homme. Borréliose de Lyme ou encore anaplasmose touchent un nombre grandissant de personnes. 

Du nord au sud du Canada, les tiques sont partout et l’Île-du-Prince-Édouard ne fait pas exception. À l’heure des promenades en forêt et des pique-niques dans l’herbe, les petits acariens ne sont jamais loin. 

«L’avantage de l’île, c’est qu’il y en a moins qu’ailleurs, car il n’y a pas de cerfs dont le sang est très apprécié des tiques», précise Vett Lloyd, biologiste à l’Université Mount Allison au Nouveau-Brunswick.

L’importante population de renards qui se nourrissent des rongeurs porteurs de tiques limite également leur trop grande prolifération, ajoute le spécialiste. 

2 Vett Lloyd

Le biologiste Vett Lyod explique que le réchauffement climatique contribue à l’augmentation des populations de tiques à l’Î.-P.-É. (Photo : Gracieuseté de Vett Lyod)

Les tiques ont néanmoins colonisé toute l’île, du nord au sud, d’est en ouest. Selon Vett Lloyd, elles ont franchi le détroit de Northumberland en s’accrochant à des oiseaux migrateurs en provenance de Nouvelle-Écosse et du Nouveau-Brunswick. 

«Une fois à l’île, elles sont déplacées un peu partout par des animaux sauvages», poursuit-il. 

Le manque de neige en cause 

Le biologiste et son équipe constatent que les tiques sont également en augmentation dans la province. 

Le réchauffement climatique, à l’origine d’hivers de plus en plus doux et d’un couvert de neige de plus en plus faible, explique en partie cette hausse.

«Avant, il y avait tellement de neige que les tiques mouraient de faim sous la neige, ça permettait de contrôler la population. Ce n’est plus le cas aujourd’hui», observe Vett Lloyd.

Une tique femelle qui survit aux rigueurs hivernales produit de 2 000 à 3 000 œufs. Résultat, la population augmente de manière exponentielle. 

Cette évolution est surveillée de très près, car certaines espèces représentent une menace sanitaire. Elles sont en effet capables de transmettre des bactéries néfastes pour les humains. 

La tique à pattes noires, présente à l’Î.-P.-É., est notamment porteuse de la bactérie Borrelia burgdorferi causant la borréliose de Lyme. Cette maladie se propage à l’homme par la morsure d’une tique.

Car pour passer de la larve à l’état adulte, la tique mord. Elle se fixe sur le corps de son hôte et se gorge de sang. Son poids peut alors être multiplié par 600. Plus elle reste longtemps, plus elle risque de diffuser la maladie.

3 Tique à pattes noires femelle

Pour passer de la larve à l’état adulte, la tique à pattes noires mord. Elle se fixe sur le corps de son hôte et se gorge de sang. Son poids peut alors être multiplié par 600. Plus elle reste longtemps, plus elle risque de diffuser 

la maladie de Lyme. (Photo : Gracieuseté de Vett Lyod)

«Les personnes à risque sont surtout celles qui travaillent dans les forêts et les broussailles, les gardes forestiers ou les agriculteurs, les promeneurs parfois», affirme Vett Lloyd. 

Après la piqûre, après avoir repéré et retiré la tique, la contamination peut être rapidement enrayée grâce à un traitement antibiotique. 

Des vaccins à l’étude 

Mais en cas de retard de diagnostic, la maladie peut évoluer, avec d’abord des symptômes tels que des maux de tête, de la fatigue et des douleurs musculaires ou articulaires, puis des palpitations, de l’arthrite, etc. 

Tique encadre

«Le diagnostic n’est pas évident à poser face à la diversité des symptômes et les tests sanguins ne sont pas toujours fiables», expose Vett Lloyd. 

D’après Santé canada, entre 2009 et 2023, le nombre de cas a été multiplié par presque 18 à l’échelle nationale. 

«Et ces chiffres officiels sont largement sous-estimés, car les gens ne vont pas forcément voir un médecin», alerte Vett Lloyd. 

À l’Î.-P.-É., le gouvernement se veut rassurant. Sur le site internet de la province, on peut lire que l’île «est considérée comme une zone à faible risque de maladie de Lyme». 

Vett Lloyd relève néanmoins qu’entre 10 et 15% des tiques sont infectées par la borréliose de Lyme : «Et c’est en augmentation, on retrouve des spécimens contaminés un peu partout, de West Point à Cardigan.»

Une autre affection bactérienne transmise par les tiques inquiète désormais les scientifiques : l’anaplasmose. Présente au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse, elle menace l’Île-du-Prince-Édouard. 

«Nous n’avons pas encore de données pour l’île, mais nous nous attendons à ce qu’il y en ait», prévient Vett Lloyd. 

Le spécialiste insiste sur la nécessité de renforcer la recherche sur les moyens de lutte contre ces acariens. Plusieurs équipes de chercheurs développent actuellement des vaccins pour les humains et les animaux domestiques.

 

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