Du 19 au 25 janvier, la Semaine nationale sans fumée incite la population canadienne à renoncer au tabac. À cette occasion, des Prince-Édouardiennes témoignent de leur addiction à la nicotine et de leur parcours du combattant pour décrocher.
Pendant plus de 30 ans, Noëlla Arsenault a été «une esclave» de la nicotine. L’Acadienne fumait en moyenne un paquet par jour.
«Je fumais quand j’étais heureuse, malheureuse, toutes les émotions se passaient avec une cigarette, raconte-t-elle. C’était la première chose que je faisais au réveil et la dernière chose avant de me coucher.»
Le tabac, elle l’a découvert à l’adolescence, à 15 ou 16 ans : «Tout le monde fumait autour de moi, quelqu’un m’a offert une cigarette et j’ai commencé tranquillement. Ça n’a pas pris longtemps pour que je sois accrochée.»
Les années passent et la dépendance devient totale. «C’était ma priorité numéro un, si une tempête s’en venait, je m’assurais que j’avais suffisamment de paquets», se souvient-elle.
«Ça prenait le pouvoir sur ma vie»
Avoir toujours du tabac était aussi la préoccupation constante de Mary Smith. «Je me demandais tout le temps si j’en aurais assez pour le lendemain, ça prenait le pouvoir sur ma vie», partage l’insulaire qui a fumé pendant 20 ans. «Je me levais très tôt, je prenais cinq cigarettes pendant la première heure de la journée et après, seulement, je pouvais démarrer, poursuit-elle. C’était un soutien pour faire face aux difficultés du quotidien».
Noëlla Arsenault a songé plusieurs fois à arrêter sans jamais oser franchir le pas : «J’avais trop peur de me retrouver toute seule et perdue. La cigarette faisait partie de mon quotidien, me calmait, me donnait de la force […] c’était un espèce d’allié de tous les jours.»
La directrice de La Voix acadienne, Marcia Enman a, elle, tenté d’arrêter à de nombreuses reprises, en essayant les patchs, l’hypnose… sans succès.
La venue au monde de son arrière-petit-neveu l’a finalement forcée à renoncer. «Mon arrière-petite-nièce m’a dit que je ne pourrai pas embrasser son frère, car il n’aimerait pas la senteur de la fumée. Ça a été comme un couteau dans le ventre, je me suis fixé comme objectif d’être non-fumeuse avant la naissance.»
Marcia Enman a désormais arrêté de fumer il y a presque trois ans : «Ça a été la chose la plus difficile de ma vie à accomplir, après avoir fumé pendant 48 ans.»
Pour Noëlla Arsenault, c’est une crise cardiaque à l’âge de 48 ans qui l’a obligée à arrêter. «J’ai pris conscience que ça n’avait plus de bon sens, que ma santé ne supporterait plus un paquet par jour.»
«Une bataille qui n’arrête jamais»
Il a fallu deux ans à l’Acadienne pour «décrocher». Elle a d’abord tenté de réduire sa consommation par elle-même, avant de consulter son médecin de famille qui lui a prescrit des «pilules qui lui ont enfin enlevé le goût de fumer».
«Mes enfants et petits-enfants m’ont vraiment encouragée. Ils se plaignaient de l’odeur du tabac sur le linge quand ils venaient à la maison, ce n’était pas quelque chose de très valorisant», témoigne Noëlla Arsenault.
Inquiète de sa toux chronique au réveil et de son essoufflement constant, Mary Smith s’est également décidée à voir un médecin, «qui a pris le temps de l’écouter et de l’accompagner».
«La première année de sevrage a été le plus difficile, je limitais mes sorties pour ne pas être tentée, confie-t-elle. Mais, depuis 10 ans que j’ai arrêté, je me sens vraiment mieux : je respire bien, je bouge et j’ai même fait des économies qui m’ont permis de partir en vacances.»
De son côté, Noëlla Arsenault ne fume plus depuis 18 ans : «J’en ai envie presque tous les jours, mais je n’ai jamais rechuté. C’est une bataille qui n’arrête jamais.»
À Wellington, Marcia Enman a, dans son salon, un coussin qui lui rappelle chaque jour l’importance de ne pas replonger : «En me l’offrant, ma filleule m’a dit “si tu recommences, je viendrai le chercher”.»
Programmes d’aide
La province de l’Île-du-Prince-Édouard propose un programme d’abandon du tabac afin d’appuyer les Insulaires qui veulent arrêter. La province couvre la totalité du coût des produits de remplacement de la nicotine en vente libre en pharmacie (gomme, pastilles, timbres et inhalateur) et de certains médicaments de sevrage sur ordonnance.
Marcia Enman a bénéficié de ce programme : «C’est grâce à ça que j’ai arrêté, quelqu’un m’appelait chaque semaine pour suivre mes progrès et m’encourager.»
Le gouvernement fédéral offre aussi de nombreuses ressources, avec notamment la campagne Les outils pour une vie sans fumée.
Marcia Enman a bénéficié du programme d’abandon du tabac de la province de l’Î.-P.-É. Ici, on la voit avec le petit coussin fabriqué par sa filleule qu’elle a reçu trois mois après avoir arrêté de fumer comme cadeau. (Photo : Gracieuseté)
«Je me demandais tout le temps si j’en aurais assez pour le lendemain, ça prenait le pouvoir sur ma vie», partage Mary Smith qui a fumé pendant 20 ans. (Photo : Gracieuseté)