Santé
Par Marine Ernoult 

À l’Île-du-Prince-Édouard, comme partout au pays, le dépistage et le traitement de certains cancers ont été retardés, voire interrompus à cause de la pandémie de COVID-19.  Tout le retard n’a pas été rattrapé, et les conséquences ne seront pas quantifiables avant plusieurs années. 

La crise sanitaire a eu de fortes conséquences sur le parcours de soins des insulaires atteints de cancers.  Et tout n’est pas encore chiffrable. 

«La COVID-19 a aggravé les lacunes dans la prise en charge des malades.  Les effets sur les patients et le personnel soignant se feront encore sentir pendant les quatre années à venir», affirme Heather Mulligan, représentante pour la région Atlantique de la Société canadienne du cancer (SCC). 

D’après un sondage de la SCC, près de 25 % des patients canadiens ont vu leurs rendez-vous pour des soins contre le cancer, notamment des actes chirurgicaux, annulés ou reportés au cours des derniers mois.  Dans les premiers mois de la pandémie, le nombre de chirurgies du cancer a été réduit de 20 % à travers le pays.

Impact psychologique

Si les patients finissent par être soignés, les conséquences peuvent être délétères sur le plan psychologique.  «Quand on vous annonce un cancer, vous recevez une enclume sur la tête, et si en plus, vos soins sont décalés, cela peut faire des dégâts sur le plan de la confiance dans les équipes soignantes», explique Heather Mulligan. 

Sur le plan physique, «les patients arrivent avec des maladies à des stades plus avancés, qui requièrent des chirurgies vitales, des soins médicaux beaucoup plus lourds», poursuit Heather Mulligan.  C’est d’autant plus problématique à l’Île-du-Prince-Édouard, car la province doit compter sur les provinces voisines pour fournir certains traitements.

La grande majorité des Prince-Édouardiens atteints d’un cancer reçoivent néanmoins un traitement par radiothérapie dans les quatre semaines suivant leur diagnostic.  «C’est légèrement au-dessus de la moyenne nationale, l’île fait figure de leader en Atlantique», salue Heather Mulligan,

La pandémie a par ailleurs mis un frein au dépistage.  Selon les données du Registre canadien du cancer, les nouveaux cas de cancer ont chuté de 6,1 % en 2020 par rapport à la moyenne annuelle de 2015 à 2019. 

Surmortalité anticipée 

«Ça indique un grand nombre de cas non détectés qui nécessiteront des traitements dans les prochaines années, et ajouteront une pression supplémentaire sur le système de santé déjà en dificulté», alerte Heather Mulligan.

Les diagnostics ont également été retardés chez certaines personnes, et là, les conséquences peuvent être plus importantes.  Quelle sera leur ampleur, y compris en termes de décès? 

«On ne le saura pas avant deux ou trois ans», avertit Heather Mulligan.  Mais les chercheurs de la SCC anticipent déjà une surmortalité liée aux cancers dans les années à venir.  Ils parlent de 21 247 morts par cancers en plus entre 2020 et 2023. 

Afin d’améliorer le dépistage et la prise en charge des malades, le gouvernement de l’Î.-P.-É. a lancé une consultation à l’automne 2022 pour élaborer une nouvelle stratégie de lutte contre le cancer. 

Aux yeux d’Heather Mulligan, il faut avant tout miser sur la prévention et l’éducation des citoyens dès le plus jeune âge, à ce que sont la santé et le bien-être.

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