Santé
06 décembre 2021 Par Marine Ernoult / IJL – Réseau.Presse – La Voix acadienne
Représentation du VIH infectant une cellule humaine. (Photo : Unsplash)

Le mercredi 1er décembre, c’est la journée mondiale de lutte contre le sida.  Alors que la pandémie de COVID-19 a eu un impact négatif sur la prévention et la prise en charge du VIH, unebonne nouvelle est tout de même à souligner.  Pour la deuxième fois dans l’histoire, une personne s’est spontanément débarrassée du virus.  On ignore encore les mécanismes immunologiques ayant conduit à son éradication naturelle.

C’est l’histoire d’une femme qui, après avoir été infectée par le virus du sida, serait la seconde personne au monde à avoir naturellement éliminé toute trace du VIH de son organisme, sans traitement médicamenteux ni greffe de moelle osseuse.  Il semble que le système immunitaire de cette patiente, originaire d’Argentine, a réussi à développer une immunité stérilisante, capable de totalement et définitivement éradiquer le virus. 

C’est la conclusion probable, mais impossible à formellement démontrer, à laquelle est parvenue une équipe de chercheurs argentins et américains.  Leurs résultats ont été publiés le 16 novembre 2021 dans la revue Annals of Internal Medicine.  Selon les scientifiques, cela soulève «la possibilité qu’une guérison stérilisante de l’infection soit un résultat clinique extrêmement rare, mais possible».

Tout commence en mars 2013, lorsque la patiente alors âgée de 30 ans apprend à l’occasion d’un test de dépistage du VIH qu’elle est infectée.  Son dernier test négatif remonte à 2011.  Son partenaire est lui décédé du sida en juillet 2017.  Pendant les huit années qui suivent la découverte de sa séropositivité, cette femme sera soumise à dix tests de détection du virus.  Tous vont se révéler négatifs. 

Plus d’un milliard de cellules analysées

Par ailleurs, cette Argentine n’a jamais présenté de signes, évocateurs d’une infection.  Lorsqu’elle tombe enceinte, dans un but de prévention de la transmission mère-enfant du VIH, elle suit néanmoins un traitement antirétroviral pendant les deuxième et troisième trimestres de grossesse. 

À la naissance de son bébé, séronégatif pour le VIH, elle interrompt ce traitement.  Par la suite, tous ses examens s’avéreront à nouveau négatifs.  Les chercheurs n’ont trouvé aucune trace du génome du virus après l’analyse de plus de 1,19 milliard de cellules sanguines et 500 millions de cellules tissulaires séquencées.

Chez la plupart des malades, les traitements antirétroviraux empêchent les cellules infectées par le VIH de se multiplier, mais ils ne peuvent pas complètement éliminer les cellules dans lesquelles se cache le virus sous forme dormante (ce qu’on appelle le réservoir viral).  Les thérapies actuelles permettent de maintenir la charge virale d’un individu à un niveau indétectable, ce qui permet de prévenir la transmission du VIH, mais pas de l’éradiquer.

Un traitement à vie est donc nécessaire pour que l’infection reste contrôlée.  Certains individus possèdent toutefois un système immunitaire capable de contenir le VIH sans prendre de médicaments.  Ces «contrôleurs d’élite» représentent environ 0,5 % des personnes contaminées. 

«Patiente Esperanza» 

Bien qu’ils possèdent aussi des réservoirs viraux capables de produire le virus, ces individus ont des cellules immunitaires (les lymphocytes T tueurs) qui réussissent à empêcher la réplication du virus sans l’aide de médicaments.  Dans le cas de la patiente argentine, les scientifiques estiment que sa guérison pourrait être la conséquence d’une réponse similaire des lymphocytes T tueurs.

Dans un éditorial associé à l’article, Joel Blankson, chercheur à l’hôpital Johns Hopkins (Baltimore, Maryland), estime qu’il pourrait être intéressant de mettre au point des traitements qui apprennent au système immunitaire d’autres personnes à imiter ces réponses efficaces pour contrôler l’infection. 

Les auteurs de l’étude précisent quant à eux que leur exceptionnelle patiente argentine est originaire de la ville d’Esperanza.  «Avec son accord, nous proposons de la désigner sous le nom de “patiente d’Esperanza” afin d’envoyer un message d’espoir dans la recherche d’un traitement de l’infection par le VIH», concluent-ils.

Repères : 

• À l’heure actuelle, environ 37,7 millions de personnes vivent avec le VIH/sida sur la planète.  Pas moins de 1,5 million de nouveaux cas ont été diagnostiqués en 2020.

• Selon les estimationsnationales, 63 110 Canadiens vivaient avec le VIH à la fin de 2016.

• Depuis 1985, pas moins de 84 409 cas ont été diagnostiqués au pays. 

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