La plus jeune d’une famille de neuf enfants, dont cinq sont encore de ce monde, Marlene Doucette-Stuart, de Stanhope, a hérité de la propriété où elle a grandi à Pleasant View, quelques kilomètres à l’ouest de Miminegash. Elle y préserve tout ce qui lui vient de sa famille, depuis les grands-parents de ses parents, Joséphine et Léo Doucette jusqu’à elle.
Marlene Doucette avait 36 ans lorsqu’elle s’est mariée, et son père Léo est décédé lorsqu’elle avait 21 ans. «J’ai été très proche de ma mère, toute ma vie. Même après mon mariage, je l’appelais tous les jours, même si c’était juste pour lui dire que les enfants étaient OK», raconte celle qui est maintenant propriétaire de la maison de son enfance.
Elle posait toujours beaucoup de questions à sa mère et lui faisait raconter des épisodes de sa vie. En prévision du 90e anniversaire de naissance de sa mère, en 2002, Marlene avait préparé une exposition sur sa vie, par tranches de 10 ans, et a conservé tous les morceaux de cette exposition dans un grand cartable à anneaux. Parmi les cadeaux les plus appréciés faits pour cette occasion, mentionnons des informations sur la généalogie de la famille réunies par un cousin nommé Georges Arsenault. «Le grand-père de Georges et ma grand-mère étaient frère et sœur. Leur père a eu 15 enfants au cours de trois mariages et ils faisaient partie de la deuxième famille», explique-t-elle.
Sur tous les meubles autour d’elle, dans tous les tiroirs qu’elle ouvre, sur tous les murs de couleurs pastels, on trouve des photos, des morceaux d’informations, des lettres écrites à la main lorsque sa mère avait 11 ans (1923), des scapulaires, des extraits de naissance, le tout étonnamment bien préservé.
«Lorsque j’ai pris possession de la maison et qu’il fallait faire le ménage, je n’ai rien voulu jeter. J’ai trouvé des affaires que je ne pensais jamais trouver et beaucoup de preuves que ma mère accordait toute sa confiance à Marie, la mère de Jésus. Lorsque ma mère est née, le médecin croyait qu’elle ne vivrait pas, tant la naissance avait été difficile. Ma grand-mère a prié et a promis que si sa fille vivait, elle ne porterait que du blanc et du bleu jusqu’à l’âge de 8 ans. Ma mère se souvenait très bien de la première fois où elle a eu la permission de porter d’autres couleurs», dit Marlene.
Non seulement sa mère a vécu, mais lorsqu’elle avait six mois, elle a été inscrite dans un concours de beauté pour bébé à Boston où elle avait remporté le troisième prix : son portrait tiré et offert dans un cadre ovale avec le verre bombé. «J’ai toujours taquiné ma mère en lui disant qu’elle n’avait pas gagné le premier prix à cause du nez des Poirier.»
Une dévotion profonde
Avec une enfance ainsi placée sous la protection divine, ce n’est guère surprenant que des années plus tard, Joséphine Doucette devienne une grande promotrice de la médaille miraculeuse. «En 1953, ma mère a fait un séjour à l’hôpital. Sa voisine de chambre était Patricia MacDougal (née Callaghan d’Ebbsfleet). Cette dame a parlé à ma mère de l’Association de la médaille miraculeuse et ma mère est devenue membre et a fourni des médailles miraculeuses à 250 personnes environ, et même plus. J’en trouve partout dans la maison, dans des endroits les plus inattendus. Et bien sûr, je les conserve. J’en ai aussi donné», dit la dame.
Joséphine est décédée en 2006 à l’âge de 93 ans. Quelques années plus tard, Marlene a découvert qu’elle était atteinte d’un cancer. «Même si j’ai prié comme ma mère me l’avait enseigné, j’ai tout de même eu une mauvaise nouvelle. J’étais vraiment contrariée que sa foi dans les prières n’ait pas fonctionné pour moi ! Le matin suivant, je me suis levée à 5 heures, incapable de dormir. Je me suis souvenue que j’avais promis à ma fille de lui faire des muffins pour une activité où elle allait. J’ai fouillé dans mes vieilles recettes et j’ai choisi celle des muffins aux ananas et aux carottes. Lorsque j’ai sorti la carte de recettes un autre bout de papier est sorti avec, avec les mots écrits de la main de maman : “Récite cette prière tous les jours, c’est le meilleur remède que tu puisses prendre“. Je ne sais pas comment il se fait que c’était là, et comment je l’ai trouvé juste à ce moment, mais j’ai su que je n’étais pas seule», dit Marlene. Lorsque le cancer est réapparu en 2017, Marlene a opté pour une double mastectomie.
Dynamique, pleine d’énergie et courageuse, Marlene a travaillé très dur pour remettre la propriété familiale en état. La grange, entièrement refaite, qu’elle loue occasionnellement à des connaissances, est une pure merveille.
Maison centenaire
La maison est très ancienne. À l’origine, elle était située sur une autre portion du terrain. «Lorsque mes parents s’y sont installés, en 1932, elle était déjà ici. Ils ont décidé de l’acheter en 1936. Mon père aurait pu l’avoir pour 500 $ s’il avait eu l’argent, mais au final, elle lui a coûté 750 $, avec les 50 acres de terrain. Durant mon enfance, refaire le toit de la maison lui avait coûté 600 $», se souvient-elle.
Son terrain se limite maintenant à 29 acres, ce qui reste considérable, surtout en raison de la forêt acadienne qui occupe tout l’arrière de la propriété. «J’ai eu des offres, toutes les organisations de protection des terres veulent l’avoir, mais je ne suis pas décidée à m’en départir.»
Marlene, qui habite à Stanhope avec son mari, se rend dans la maison de Pleasant View seulement en été. Comme il n’y a pas de douche à l’intérieur de la maison, elle a fait installer une douche extérieure, qui lui procure une sensation de grande liberté, à l’abri des regards, évidemment. L’hiver, elle ferme tout et rouvre la maison le printemps suivant, en partageant son temps entre Stanhope et Pleasant View.
«J’apprécie tout ce que la vie m’offre et tout ce que je peux apprendre sur ma famille pour raconter l’histoire à mon tour. J’aime avoir les vraies informations et je tente toujours de recouper avec d’autres sources. J’aimais beaucoup consulter le site web Island Lives de UPEI. Mais depuis quelque temps, le site ne marche plus comme avant», se désole-t-elle.
Marlene fait partie d’une très grande famille. Ses parents ont eu neuf enfants qui à leur tour ont eu 35 enfants. «Lors de son 90e anniversaire, ma mère avait 107 descendants directs.»