Patrimoine
Par Marine Ernoult / IJL – Réseau.Presse – La Voix acadienne
Georges Arsenault est un historien acadien, originaire de l’Î.-P.-É.  (Photo : La Voix acadienne)

L’Île-du-Prince-Édouard célèbre cette année le 150e anniversaire de son entrée dans la Confédération. À l’époque, la majorité des habitants de l’Île s’y opposait, y compris les Acadiens. C’est une dette écrasante qui a forcé l’Île à devenir la septième province canadienne.  

Il y a 150 ans, le 1er juillet 1873 très exactement, l’Île-du-Prince-Édouard faisait son entrée dans la Confédération. Elle devenait ainsi la septième province du Canada aux côtés du Québec, de l’Ontario, du Nouveau-Brunswick, de la Nouvelle-Écosse, du Manitoba et de la Colombie-Britannique.

L’adhésion aurait pu se faire dès 1867, mais la majorité de la population s’y opposait fermement. Les habitants s’inquiétaient que l’union avec le reste du pays n’augmente les taxes, mette fin à l’Assemblée législative et mène à la conscription obligatoire pour les guerres.

«L’Île craignait aussi d’être désavantagée par sa petitesse face au Québec et à l’Ontario et parce que son économie dépendait beaucoup de ses relations avec la Nouvelle-Angleterre», détaille l’historien Georges Arsenault.

Dette de chemin de fer

À l’image du reste des habitants, les députés siégeant à l’Assemblée législative étaient contre l’idée de faire partie du Canada. Parmi eux figuraient deux Acadiens, membres du Parti libéral, Stanislaus F. Perry de Tignish et Joseph-Octave Arsenault d’Abram-Village.

«Eux non plus ne voulaient pas être gouvernés par des étrangers. Stanislaus F. Perry avait même menacé de déménager aux États-Unis si l’île rejoignait la Confédération», révèle Georges Arsenault.

«Néanmoins, certains chefs de file acadiens et curés québécois y étaient plus favorables, car ils y voyaient un moyen de bénéficier d’un meilleur appui des Canadiens français catholiques du Québec», ajoute-t-il.

En 1871 la donne change. L’Î.-P.-É. commence à construire un chemin de fer pour améliorer son économie et développer le tourisme. Le projet dépasse rapidement son budget et, un an plus tard, la province fait face à un effondrement financier imminent.  Le gouvernement prince-édouardien entreprend alors des démarches auprès des Canadiens pour se joindre à la Confédération.

«Cette lourde dette a forcé l’île à changer de position. Elle n’avait plus les moy ens de rester indépendante», confirme Georges Arsenault.

Des Acadiens propriétaires

Le Canada prend en charge la dette du chemin de fer de l’Î.-P.-É., achète les terres des propriétaires terriens non-résidents et garantit une communication continue par bateau avec le continent.

Cette intégration a-t-elle profité aux Acadiens? «Ça n’a pas permis d’ouvrir des écoles catholiques de langue française, mais on peut dire que le chemin de fer a profité à tout le mon-de», considère Georges Arsenault.

Aux yeux de l’historien, le programme de rachat de terres lancé par Ottawa a également permis à certains fermiers acadiens locataires d’acheter des terrains à des prix abordables.

Au niveau politique, Stanislaus F. Perry est devenu le premier Acadien des Maritimes à être élu au Parlement canadien. Quant à Joseph-Octave Arsenault, il a eu une très longue carrière : il a siégé pendant 28 ans à l’Assemblée législative, avant d’être nommé au Sénat où il est resté jusqu’à sa mort.

Le Réveil acadien

L’entrée de l’Île-du-Prince-Édouard dans la Confédération canadienne correspond à la période du réveil acadien.

«Ce sont des années où les choses commencent à bouger, où les Acadiens commencent à prendre leur place et à être plus éduqués», rapporte Georges Arsenault.

Si la majorité des Acadiens reste des fermiers et des pêcheurs, les filles commencent à avoir accès à une éducation de qualité et certains jeunes hommes poursuivent des études supérieures.

À Rustico, le père Georges-Antoine Belcourt (curé de 1859 à 1869) met sur pied une école secondaire qui permet à de jeunes garçons d’obtenir un certificat d’enseignement bilingue. Quelques-uns deviendront même avocats, juges et médecins.

Mais c’est aussi l’époque où les Acadiens commencent à s’angliciser. «Ce n’était pas la priorité du gouvernement de garder le français sur l’île. Les Acadiens ne représentaient que 10% de la population et n’avaient pas de poids politique énorme», précise Georges Arsenault.

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