Le ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté, Marc Miller, a annoncé, le 22 janvier, que le gouvernement du Canada réduira d’environ 35 % le nombre de permis d’études octroyés à des étudiants internationaux. Le président du Collège de l’Île, Sylvain Gagné, est perplexe quant aux effets que cette annonce aura sur l’institution qu’il dirige depuis juillet 2023.
Depuis le mois de décembre, le gouvernement du Canada a fait trois annonces touchant d’une part, les étudiants internationaux et d’autre part, l’immigration francophone. Sylvain Gagné, président du Collège de l’Île, est en contact avec ses homologues des autres provinces ainsi qu’avec le gouvernement provincial pour démêler tout ça.
Première annonce
En décembre 2023, le gouvernement fédéral a annoncé que la preuve d’autonomie financière que les étudiants internationaux doivent fournir pour recevoir leur permis d’étude passait de 10 000 $ à 20 000 $ canadiens. «Je suis assez en faveur de cette mesure, car certains étudiants internationaux rencontrent des difficultés financières et sont obligés de travailler beaucoup pour vivre. Cela affecte leurs études, évidemment. Cependant, déjà avec cette annonce, notre bassin de candidats potentiels se trouvait diminué», analyse Sylvain Gagné.
Deuxième annonce
Le 16 janvier 2024, le ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté du Canada, Marc Miller, de passage à Caraquet au Nouveau-Brunswick, a réitéré les cibles en immigration francophone annoncées en novembre dernier et détaillé quelques initiatives visant à atteindre ces nouvelles cibles de 8 % d’immigration francophone hors Québec en 2026.
Troisième annonce
Le 22 janvier, le ministre Marc Miller annonce le plafond en matière de permis d’études octroyés à la grandeur du Canada pour des étudiants internationaux. Cela place le Collège de l’Île dans une position d’incertitude, surtout que les informations disponibles sur la mise en œuvre de la nouvelle chaîne d’approbation des permis d’études tardent à venir.
«On ne sait pas comment tout cela sera réparti. Ça nous inquiète certainement, car même avant ce plafond, nous ne pouvions pas remplir nos cohortes suffisamment pour atteindre la rentabilité. L’idée de perdre 35 % de nos étudiants ne me plaît pas, c’est évident. En plus, je pense que cette annonce a été improvisée. Le gouvernement provincial l’a appris en même temps que nous, alors qu’il devient un décideur de premier plan dans la nouvelle chaîne d’approbation», dit Sylvain Gagné.
Mais il y a plus. Selon lui, le même ministre, à sept jours d’intervalle, ne peut pas vouloir doubler les nombres d’immigrants francophones hors Québec pour redonner aux communautés un poids démographique plus «santé» et presque en même temps, limiter la capacité des collèges et universités francophones à contribuer à l’entrée au Canada d’étudiants étrangers francophones, qui augmentent les communautés.
«Nous sommes, au Collège, une voie pour l’immigration au Canada. Ça ne sert à rien de le cacher. Nous accueillons des étudiants qui viennent souvent en famille, avec des enfants. Ils étudient en français, ils apprennent le français, ils contribuent à la vie en français à l’Île, etc. Ils sont des immigrants qui grossissent nos communautés francophones», dit Sylvain Gagné.
De ce point de vue, le président du Collège de l’Île fait partie de ceux qui demandent à ce que les collèges et universités francophones en milieu minoritaire ne soient pas contraints par ce plafonnement en vigueur depuis le 22 janvier 2023. «Je recommande un moratoire pour les institutions francophones en milieu minoritaire, en particulier dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre, et un moratoire également pour que ce plafond ne s’applique pas aux programmes d’études dédiés à former du personnel dans des domaines où il y a pénurie.»
D’un point de vue plus général, les étudiants, incluant les étudiants étrangers, sont très présents sur le marché du travail, car ils sont obligés de travailler. «Ils occupent les emplois de service au comptoir, dans les cafés, les stations-service, on ne les voit pas, mais on a besoin d’eux. Si on enlève 35 % de cette source de main-d’œuvre, ça va paraître», croit Sylvain Gagné.
Nouveau processus
En attendant qu’un moratoire ou des exemptions soient annoncés, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) attribuera une partie du nombre de demandes plafonné à chacune des provinces et chacun des territoires, qui répartiront ensuite le nombre qui leur a été alloué entre leurs établissements d’enseignement désignés.
À compter du 22 janvier 2024, afin de mettre en œuvre le plafond, chaque demande de permis d’études présentée à IRCC devra être accompagnée d’une lettre d’attestation de la province ou du territoire concerné. Les provinces et les territoires doivent mettre en place un processus pour la délivrance de lettres d’attestation aux étudiants au plus tard le 31 mars 2024.
Ces mesures temporaires seront en place pendant deux ans, et le nombre de demandes pour un nouveau permis d’études qui sera accepté en 2025 sera réévalué à la fin de la présente année. Au cours de cette période, le gouvernement du Canada continuera de travailler avec les provinces et les territoires, les établissements d’enseignement désignés et les intervenants nationaux du milieu de l’éducation sur l’élaboration d’une voie à suivre viable pour les étudiants étrangers, notamment en finalisant le cadre pour les établissements reconnus, en établissant des niveaux viables à long terme d’étudiants étrangers et en veillant à ce que les établissements d’enseignement postsecondaire soient en mesure d’offrir un niveau adéquat de logements étudiants.