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Par Jacinthe Laforest 
De gauche à droite, Marie Arsenault Lyon, Maria Bernard, Yvonne Doucette, Eileen Chiasson-Pendergast et la photographe Stella d’Entremont. Marguerite Gallant, également dans le livre, était absente. (Photo : J.L.)

L’exposition tirée du livre de Stella d’Entremont : ACADIENNES Voix de la génération silencieuse est en montre au Musée acadien de l’Île-du-Prince-Édouard pendant les prochains mois.  Le vernissage a eu lieu le dimanche 5 mai, en présence de la photographe à l’origine du projet et de quatre des cinq femmes de l’Île-du-Prince-Édouard étant en vedette dans le livre.

Marie Arsenault Lyon est catégorique.  «J’étais bien trop wild pour être silencieuse», dit-elle, à propos de la description qu’on fait de sa génération, celle qui a donné naissance aux baby-boomers. 

Yvonne Buote-Doucette-Gallant est moins catégorique.  «Pendant qu’on vivait nos vies, on ne s’en rendait pas compte, mais maintenant oui, je me rends compte qu’on n’avait pas notre mot à dire.  On ne discutait pas, on ne se plaignait pas, on faisait ce qui devait être fait.  On prenait les choses comme elles venaient», dit la dame, encore très dynamique. 

Devenue veuve très jeune, Maria Bernard a commencé à prendre conscience que les femmes de sa génération étaient non seulement silencieuses, mais également invisibles.  «Pendant que les J. Henri Blanchard récoltaient la gloire, il y avait des femmes à la mais-on dont on ne parlait jamais», dit-elle. 

Elle raconte cette anecdote savoureuse survenue lors de son premier mandat de première femme présidente de la coopérative de Mont-Carmel.  «Les coopératives sont bâties sur le principe de “Un membre un vote“.  Seuls les hommes étaient membres alors que les femmes faisaient les achats.  À la mort de mon mari, j’ai dû devenir membre.  Je me rappelle d’une réunion où on préparait l’assemblée annuelle.  J’ai demandé aux conseillers si certains pourraient faire des sandwichs.  Ils ont dit oui, bien sûr.  J’ai alors insisté : vous allez faire des sandwichs?  Évidemment, ils tenaient pour acquis que leurs femmes allaient faire ça sans dire un mot», raconte Maria Bernard. 

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Un des conseillers est donc arrivé à la maison avec le pain et les ingrédients pour les sandwichs.  Sa femme lui a dit qu’elle n’avait pas le temps, qu’elle avait déjà trop de travail.  «J’avais parlé à cette dame entre temps et on s’était mises d’accord.  Elle a fini par faire les sandwichs, car elle voulait que ce soit mangeable, mais c’est dire à quel point les femmes de cette génération n’avaient pas leur mot à dire.»

Née en 1945, Eileen Chiasson-Pendergast est la plus jeune de toutes les femmes du livre.  Elle ne s’identifie pas à la notion de génération silencieuse.  «Je n’ai jamais été silencieuse de ma vie», assure-t-elle, présentant plusieurs exemples de sa force de caractère. 

Dans sa région de Prince-Ouest, la notion de génération silencieuse peut être associée à une autre réalité : les Acadiens et les Acadiennes ne disposaient pas d’un très bon statut social.  «Lors des pique-niques de la paroisse, les Acadiennes étaient cantonnées dans les cuisines à faire la vaisselle tout l’après-midi tandis que les autres femmes faisaient le service.  Elles étaient silencieuses et invisibles.»

Eileen Chiasson-Pendergast a travaillé dur toute sa vie, comme les femmes de son âge et plus âgées qu’elle.  «Je n’ai jamais pris soin de mes mains et je les trouve laides.  J’ai hésité à participer, un peu à cause de ça, et finalement, je suis contente d’avoir accepté», dit-elle.

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Marie Arsenault Lyon écoute attentivement les explications de Stella d’Entremont au micro.   (Photo : J.L.)

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