En audience devant le Comité permanent de l’Assemblée législative sur le Développement économique et l’Éducation, le 23 janvier dernier, le président du syndicat des quelque 270 chauffeurs d’autobus de la province a affirmé que la province a mis la charrue devant les bœufs, dans sa hâte d’électrifier sa flotte d’autobus scolaire à n’importe quel prix.
Robert Geiss est catégorique. Les autobus électriques sont fantastiques, mais ils ne conviennent pas aux routes de l’Île-du-Prince-Édouard ni aux trajets quotidiens de transport scolaire.
Lors d’une audience devant le Comité permanent de l’Assemblée législative sur l’Éducation et le Développement économique, le 23 janvier dernier, il a donné de nombreux exemples du degré de mésadaptation des véhicules électriques pour la tâche qu’on leur demande.
Les autobus électriques dans la province ont une autonomie de 150 kms, mais ils ne peuvent pas faire un voyage aller-retour Charlottetown-Summerside sur une seule charge. La dépense énergétique sur les grandes routes est supérieure à celle en ville.
«J’ai fait un aller-retour Charlottetown-Summerside avec un autobus qui a une autonomie de 200 kms. Il me restait 16 kms. Je recommande à mes chauffeurs d’autobus de ne pas se fier à l’autonomie sur papier», dit-il.
Selon que l’autobus est plein ou moins chargé, selon la température, le type de trajet, le nombre d’arrêts, la dépense du véhicule varie, peu importe l’autonomie officielle, a-t-il expliqué.
Robert Geiss, président du local 1145 du syndicat qui représente les quelque 270 chauffeurs d’autobus scolaire à l’Île, croit que la province a mis la charrue devant les bœufs, dans sa hâte de donner l’exemple en matière d’électrification des transports. (Photo : J.L.)
Mésadaptation
«Les mécaniciens ne sont pas encore formés pour s’occuper de ces nouveaux véhicules. D’ailleurs, si ces derniers sont sous garantie, ils n’ont pas le droit d’y toucher. Il faut attendre que les techniciens viennent de Moncton, de Montréal ou de l’Ontario», soutient Robert Geiss.
Il a parlé d’une flotte de plus de 10 autobus flambant neufs qu’on ne pouvait pas mettre sur la route. Pourquoi? Parce qu’ils étaient programmés pour des pompes à électricité de niveau 3 et qu’il n’y en a pas assez à l’Île. Une fois le problème identifié, le technicien de la compagnie a découvert que son ordinateur hautement sécurisé ne voulait pas accepter le logiciel de niveau 2 et qu’il ne pouvait donc pas l’installer sur les autobus. Finalement, une solution a été trouvée et les autobus ont pu être mis en circulation. «Pour régler un problème qui aurait pu prendre cinq minutes, ça a pris trois semaines», a ironisé le président du local 1145 du syndicat des chauffeurs d’autobus.
Gord McNeilly, député libéral du district 14 (région de Charlottetown), s’est intéressé au travail réel des chauffeurs d’autobus. (Photo : J.L.)
Les membres du Comité permanent de l’Assemblée législative sur l’Éducation et le Développement économique se sont montrés sensibles aux enjeux des distances. Ils craignent, par exemple, que des élèves soient privés de sorties éducatives pendant le jour, ou d’expériences sportives interscolaires, interrogé sur la possibilité que les commissions scolaires puissent conserver une flotte d’autobus «fossiles», Robert Geiss a laissé entendre que cette question ne serait pas du ressort des CS, mais du gouvernement, qui est bien décidé à électrifier la flotte.
Robert Henderson, député libéral du district 25 dans l’ouest de la province, est le président du Comité permanent de l’Assemblée législative sur l’Éducation et le Développement économique. (Photo : J.L.)
Anxiété de portée
Robert Geiss dit qu’il lui est arrivé une fois de rester en panne de courant. «Vous pensez que c’est dur de diriger votre auto sans direction assistée? Essayez avec un autobus de 35 pieds de long. Dernièrement nous avons découvert que les cahots sur la route pouvaient causer un mauvais contact et couper le courant, sans aucun avertissement.»
Zack Bell est le député conservateur du district 10 (région de la capitale). (Photo : J.L.)
Ce «défaut», combiné aux incertitudes quant à l’autonomie, cause une nouvelle forme d’anxiété (l’anxiété de portée] qui touche maintenant les chauffeurs d’autobus et peut-être même leurs passagers.
Karla Bernard, député du Parti vert pour le district 12 (région de la capitale). (Photo : J.L.)